Des algues empoisonnantes

    Les algues vertes puent et défigurent les plages. Elles empoisonnent le tourisme balnéaire et coûte de plus en plus cher aux collectivités littorales (1 milliard d'euros en 30 ans (1)).

    Mais elles seraient peut-être sont aussi dangereuses, voire mortelles !

    Pourquoi ? En pourrissant sur les plages, elles forment un gaz soufré à l'odeur d'œuf pourri: l'hydrogène sulfuré (H2S). Ce gaz, non content d'être nauséabond, est toxique à forte concentration. Le ministère du développement durable (MEEDDM) a donc commandé une étude à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) (télécharger le rapport en PDF - 10 Mo).

D'où viennent ces algues vertes ?

    Les algues vertes (Ulva armoricana & Ulva rotundata) "poussent" naturellement en mer, elles profitent l'été de la chaleur et mais manquent de sels nutritifs apportés essentiellement l'automne par les pluies qui lessivent les terres. Mais l'explosion des concentrations des eaux en nitrates, sels nutritifs et véritables fertilisants, a provoqué leur formidable développement. On parle désormais de "marée vertes". Elles se déposent donc en masse sur les plages pour pourrir à l'air libre au grand damne des riverains et de l'économie balnéaire.

    Ces nitrates proviennent des engrais agricoles et du lisier de porc (2) épandus dans les champs pour les fertiliser. En telle quantité que tout n'est pas consommé par les plantes et ruisselle avec les pluies dans les rivières puis jusqu'à la mer. Ils enrichissent alors anormalement les eaux et provoquent un déséquilibre du milieu appelé "eutrophie" (cf schéma de P. Bordenes, IFREMER).

Schéma récapitulatif montrant l'impact des pratiques agricoles sur les milieux aquatiques: les engrais et lisiers agricoles excédentaires ne sont plus retenus par les milieux tampons, ils s'écoulent dans les rivières jusqu'à la mer et provoquent le développement des algues

Un problème plus large ?

    La prolifération des algues vertes n'est donc qu'une nuisance en aval de la pollution agricole. Les nitrates, bien avant de polluer la mer, polluent les eaux douces et posent un sérieux problème de qualité des eaux. D'abord en termes de fonctionnement écologique des écosystèmes aquatiques puis en terme d'approvisionnement en eau potable !

 

Que faire ?

    En aval, on peut fermer l'accès aux plages (volet sanitaire) et effectuez le ramassage des algues. La biomasse des algues peut être ensuite transformée en produits naturels pour l'agriculture (engrais, fongicide) et en énergie (biogaz, biocarburant, chaleur et électricité). Mais ce ne sont que des mesures d'urgence très locales.

EDIT: Le gouvernement s'est engagé, suite à cette affaire, à assurer le financement du nettoyage des plages et à renforcer les mesures de sécurité (Libération.fr 07/09/09) lors de ces opérations.

Des tracteurs ratissent les plages et collectent les alguesCrédit: F. Lamot, Wikimedia commons by-sa.

    Il faut agir en amont pour régler le problème. C'est au niveau de l'agriculture, dans tout le bassin versant concerné, que doivent se trouver les solutions. L'État a déjà mis en place, sous la pression de l'UE, des plans d'action. Cela a  réduit la pollution bretonne de 20%. Mais ce n'est pas encore suffisant selon les associations de protections de la nature, il faut allez plus loin dans la réduction et la déconcentration des élevages de porcs et de volailles, dans le traitement du lisier (production de biogaz), dans la réduction des intrants azotés agricoles et dans la création de zones tampons (bandes enherbées, haies, zones humides).

EDIT: Le gouvernement a créé une mission interministérielle sur ce problème et a rappelé les engagements des Grenelles de la mer et de l'environnement:

  • Résorption des points de dépassement des 50mg/l de nitrates et des excédents de phosphore en 5 à 10 ans.
  •  - 40 % des rejets de nitrates et de phosphates en 2012-2014 dans les zones les plus vulnérables.
  • Objectif "zéro rejet urbain non traité en mer" en 2030.


    En bref, pour éviter ces marées vertes dommageable pour la santé et l'économie touristique, il faut modifier les pratiques agricoles actuelles en faveur de pratiques plus durables.

    Et encore, en Bretagne, il ne s'agit que de laitue de mer, ailleurs en méditerranée, ce sont des algues invasives toxiques qui menacent les plages.




Sources:

G. Launay, 07/09/09. "Sur les algues vertes, la politique de l'autruche, c'est fini"  Interview de Chantal Jouanno. Libération.fr
JL Goudet, 08/09/09. Les algues vertes suspectées dans la mort d'un homme . Futura-Sciences.
R. Boughriet, 14/08/09. Le Ministère du Développement durable lance une étude sur la toxicité des algues vertes en Bretagne. Actu-Environnement.

Toxicité des algues vertes en Bretagne, le MEEDDM lance une étude de toxicologie. Actualités News Environnement.