Une économie pauvre en carbone mais riche en emploi ?
Par Gregoire Macqueron le dimanche, décembre 14 2008, 23:12 - Milieu professionel & Emploi - Lien permanent
Synthèse
C’est en tout cas ce qu’annonce rapport du WWF. Selon ce rapport,
une économie française « verte », qui s’orienterait vers une réduction
des émissions de CO2 de 30% en 2020 (base : 1990), permettrait de
gagner 680 000 emplois (solde comprenant la destruction d’emploi dans
les secteurs fortement émetteur de carbone).
Le plus grand gisement d’emploi se trouve dans l’investissement en
faveur de l’efficacité énergétique (560 000 emplois), puis dans la
production d’énergie renouvelable (ENR) (316 000). Les destructions
concerneraient 140 000 emplois dans les énergies « conventionnelles »
(pétrole, gaz, charbon) et 110 000 dans l’automobile. En effet, les
secteurs énergivores sont plus pauvres en emplois que ceux des ENR et
de l’efficacité énergétique.
D’autre part, cette politique d’efficacité énergétique se traduirait
par une réduction de la facture des ménages pour ce poste, et donc par
une augmentation du pouvoir d’achat. D’où un gain de consommation et
une création de 48 000 emplois supplémentaires.
Les hypothèses de ce rapport se basent sur le scénario négaWatt et sur un baril de pétrole à 100 $ en 2020.
Réflexions
Une transition vers une économie verte, un « new deal » écologique semble donc possible et même profitable.
D’ailleurs, en septembre 2008, Le Monde publiait déjà un article sur ce sujet (L. Caramel, 26/09/08). Il révélait que l’Organisation Internationale du Travail (OIT) venait de sortir un rapport sur l’emploi vert (le 24/09/08) à l’horizon 2030 sur le potentiel de l’économie verte. Selon ce rapport, le bilan de la transition serait positif. L’OIT y déclarait qu’une « économie pauvre en carbone n’est pas un danger pour l’emploi ». C’est ce qu’appelle de tous ses vœux l’association négawatt, qui prône une politique énergétique basée sur l’efficacité, la sobriété et les énergies renouvelables.
Crédit illustration: négaWatt
Les bénéfices y seraient multiples : économique et social, comme le montre les arguments développés par le WWF, géostratégique (indépendance énergétique), technologique (préparation au peak oil et à l’après-pétrole) et environnemental (changement climatique). Il semble d’ailleurs que l’État de la Californie l’ait bien compris.
Ce rapport démonte donc l’argument utilisé par certains États pour ne pas s’engager dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Le WWF effectue ici une piqure de rappel envers les pays qui prétexte la crise économique actuelle pour ne pas maintenir d’objectif ambitieux à la conférence de Poznan.
Cependant, tout n’est pas rose dans cette transition verte.
Il existe de mauvaises pratiques dans certains secteurs de l’économie « verte ». L’OIT pointe du doigt les secteurs du recyclage et des agro-carburants, par exemple. La sécurité des travailleurs et le respect de l’environnement n’y sont pas toujours réellement pris en compte.
La destruction d’emploi engendrera des situations difficiles pour les employés des secteurs en décroissance. Un programme d’accompagnement devra donc être mis en place pour permettre leur reconversion dans cette nouvelle économie.
Enfin, cette « révolution verte » bute sur deux problèmes : le manque de main d’œuvre qualifiée et le financement. Il y a par exemple un déficit de candidats dans les métiers de la gestion des eaux ou des déchets. Par ailleurs, la crise actuelle amplifie ce dernier problème. Pourtant, comme l’a suggéré un professeur de l’Université du Massachusetts à M. W. Bush, les ENR qui représentent actuellement 2,3 millions d’emplois pourraient atteindre les 20 millions en 2030. L’efficacité énergétique peut atteindre les 2 à 3,5 millions.
Chiffres marquants
680 000 emplois pour moins 30% de CO2 en 2020.
La répartition des emplois « verts » serait :
- ENR : 35%
- Transport en commun : 35%
- Résidentiel et tertiaires (bâtiment) : 28%
- Électroménager : 2%
Actuellement, l’économie verte concerne environ 100 millions d’emplois sur les 3 milliards d’actifs.
Le marché des produits et services environnementaux : 1370 milliards de $ / an.
Chiffre d’affaire des « Green Tech » : 148 milliards $ (croissance de 60% en un an !).
Source :
H. Huteau, 26/11/08. Moins de CO2 pour plus d’emplois ?, Novéthic [disponible en ligne à http://www.novethic.fr]
Le Monde (L. Caramel), 26/09/08. L’économie « verte » promet des millions d’emplois.
Plus d’informations :
Association négaWatt, disponible en ligne à http://www.negawatt.org/
Crédit illustration: picapp.com